Nephilim le Jeu de l’Occulte Contemporain

Accueil du site > Background > Les Sciences Occultes > Nephilim > La Kabbale > Détail des Séfirot > La dialectique de l’ouverture et de la clôture

La dialectique de l’ouverture et de la clôture

Héssèd, din et tiférèt : Chesed, Gebourah, Tipheret

lundi 14 septembre 2009, par Didier


Le bien et le mal : approche éthique
Nous avons vu dans un autre article l’idée un équilibre et d’une harmonie du monde reposant sur trois piliers : din, héssèd et tiférèt.
Ces trois sefirot offrent aussi une réflexion éthique sur la question du bien et du mal, ainsi que sur la question plus générale des structures ouvertes et fermées. Nous en poursuivons donc une interprétation selon de nouvelles perspectives.

Les trois présentes sefirot sont également organisées selon le schéma du ségol.

Le Segol

La kabbale propose une conception tout à fait originale du bien et du mal : est « bien » tout ce qui tend à être en accord, au sens musical du terme, avec la dynamique et la force créatrice qui anime le vivant ; est « mal »tout ce qui s’oppose à la vibration de la force créatrice du souffle du vivant. Certes, un tel « mal » n’est pas à entendre au sens habituel de ce mot, il ne ressemble pas à celui dont souffre notre monde, au contraire. Il s’agit du « mal » qui consiste à refuser la réalité d’u monde imparfait, c’est-à-dire la possibilité même du processus de perfectionnement et de la liberté qui le met en œuvre.

La liberté est le fondement positif et bon de la réalité, elle donne la force qui permet de progresser vers la perfection et en anime constamment le dynamisme et l’aspiration. La nécessité ou le destin, au contraire, limite et retarde cet esprit de liberté car elle soumet à l’emprise des lois naturelles. Le mal dans notre monde réside en tout ce qui diminue le rythme de perfectionnement et du développement, tant dans la nature et la matière que dans le domaine de l’esprit. Tout ce qui fige et affaiblit la spontanéité de la libre volonté, par des habitudes, des répétitions mécaniques, des inhibitions spirituelles et une passivité de l’intelligence, est une porte ouverte à ce que l’on peut nommer le domaine du mal.

La dialectique du parfait et de l’imparfait
Il est un paradoxe étonnant.
Il existe un « bien absolu » au niveau de la source divine, qui est la perfection de toute perfection. En tant que perfection, aucun changement n’est souhaité, il n’y a aucune dynamique. Mais pour les créatures, ce bien absolu représente un « mal » puisque la perfection exclut toute création et toute liberté.

« Dans la profondeur du bien absolu se cache la racine même du mal, qui est le fait de nier le miracle et le possible. »

Le bien pour l’homme réside dans le décalage entre la perfection de Dieu et la transgression de cette perfection par la création du monde. Cette création est une rupture dans l’immanence de la perfection. Toute création est moins parfaite que la source de toute perfection.
L’être du monde se conjugue ainsi à l’imparfait et à l’inattendu.
La réalité parfaite du monde en dehors de Dieu s’oppose logiquement à Sa perfection. Mais pour l’homme, c’est cette imperfection qui devient son entrée dans la perfection au sens de la formule très kabbaliste d’André Neher :

« La perfection de l’homme, c’est sa perfectibilité »…

La Kabbale et l’art
Nous rejoignons ici une idée que l’on rencontre dans le monde de l’art : l’art est la perfection des formes inexactes. La plus grande perfection artistique doit être imparfaite, alors elle sera infinie dans son effet.
Un cercle parfait, une verticale absolue sont de pures « objectivités »idéales qui n’assument nullement dans leur infaillibilité mathématique sans conflit les incertitudes des formes secrètes ou inventées qui font de l’artiste le plus rigoureux une homme, qui, comme le dit Dante, a la rectitude de l’art et la main qui tremble.

Le Cercle et la Ligne droite

Le Cercle symbolise la nécessité enclose à l’intérieur de ses lois, la fermeture qui interdit tout progrès de la liberté. La ligne droite, qui se prolonge et va toujours de l’avant sans limitation aucune, symbolise la liberté ou l’essence de la réalité en développement
L’homme, qui le plus souvent ne perçoit dans les phénomènes que l’extériorisation des choses, ne rencontre que le cercle ou que la droite. Mais ces deux principes agissent en fait dans toute réalité.
D’une part, certaines formes de nécessité sont à l’œuvre même à l’intérieur du monde spirituel ; de l’autre, la liberté de « la droite » se trouve aussi dans la loi naturelle, malgré sa nécessité. La Kabbale utilise deux termes clefs pour définir la situation fermée du cercle et l’ouverture du mouvement infini de la droite : le din et le héssèd.

Le din ou la nécessité de structuration des formes Gebourah
Le din, littéralement, c’est la loi, le jugement au sens rituel de ce qu’il faut faire ou ne pas faire. C’est aussi le jugement , au sens juridique d’un jugement prononcé par un juge qui peut conduire jusqu’à une peine capitale.
Le din, c’est le fait que toutes les choses sont telles et pas autrement.
Le din, ce sont toutes les lois immuables de la physique qui font que les choses peuvent se répéter et faire fonctionner le monde. Ce sont les lois de la gravitation universelle, la logique implacable des causes et des effets.
Le din assure la possibilité pour le monde de perdurer. Les lois du din assurent le maintien de l’univers. Sa substance, sa subsistance et sa persistance. Le din, c’est ce qui permet essentiellement l’organisation des choses, physiques, organiques, sociales. C’est la rigueur et la justice. C’est l’organisation contre l’anarchie.
Les lois du din sont des lois nécessaires, car, sans elles, il n’y aurait aucun point de repère et aucune forme possible. Le din est la limitation des choses. C’est aussi la finitude stricte du monde, des hommes et des choses : le passage et l’enfermement de l’infini dans le fini. En terme d’image, on peut comparer le din à un point absolu ; absolument fermé, sans temps et sans espace. Une configuration close, l’aboutissement d’un mouvement de singularisation. Il rend possible le vivant, car il donne forme aux choses.
Cependant, le din absolu qui ne contient pas l’ouverture que lui offrira le héssèd est un mouvement qui se retranche du lieu de la création et de la vie.

Le héssèd ou la liberté créatrice Chesed
Le Héssed est l’ouverture des formes closes. C’est le mouvement, le moment dynamique des formes, les tensions qui sont au cœur de l’existence. A l’opposé du cercle ou du point, symbole du din, la ligne droite est, de par sa tension, la forme indicatrice la plus simple de la possibilité du mouvement infini. Le héssèd naît du mouvement ou, plus exactement, de l’abolition du souverain repos fermé sur lui-même, celui du point. Ici se produit le saut du statique au dynamique. La ligne est le strict opposé de l’élément originel : le point.

Le Héssèd, c’est la dynamique de l’être, l’ouvert, le souffle vital, la respiration dans l’acte qui permet à l’être même de toute chose de s’ouvrir. Le souffle vital (héssèd) universalise ce que la forme (din) particularise.
Le Héssèd se rencontre dans tous les gestes qui disent le don et l’amour. Mouvement à l’extérieur de soi pour l’autre. Le héssèd, c’est la bonté, le geste de bonté concret pour l’autre homme. C’est aussi le désir. Désir insatiable d’infini.
En l’homme, image de Dieu, l’être est brisé et fracturé par le désir qui le traverse. Tout désir est désir de l’autre : non seul désir d’autrui ou pour autrui ou d’un objet, mais désir d’être autre. Désir de sortir d’une définition définitive de soi. Dans la dimension du héssèd, l’homme ne tend pas seulement à « mieux » être ou « à plus » être, mais il désire avant tout être autre.
Le héssèd est animé par la volonté dynamique d’être qui cherche à dépasser la pure nécessité de la physique des lois du monde pour atteindre une métaphysique de la lumière et de la liberté créatrice.

Le Tiférèt ou l’harmonie Tipheret
S’il est possible de différencier le din et le héssèd, il est rare de les rencontrer dans la réalité à l’état absolu. Le midrach Rabba sur la Genèse, texte de la kabbale qui a beaucoup été commenté, enseigne :

« Au commencement, Dieu pensa créer le monde à partir du din. Il s’aperçut que le monde ne pourrait pas subsister, il lui adjoignit ainsi le héssèd. »

C’est-à-dire qu’un monde qui ne serait que nature et physique, sans ouverture et respiration, sans renouvellement et sans créativité, ne pourrait pas persister. Un monde parfaitement structuré dans lequel il manquerait le rêve et l’imagination ne serait pas viable.
Un autre texte du midrach Rabba enseigne :

« Au commencement, Dieu pensa créer le monde à partir du héssèd. Il s’aperçut que le monde ne pourrait pas subsister, il lui adjoignit ainsi le din. »

C’est-à-dire, à l’inverse, qu’un monde qui ne serait qu’épanchement de lumière, amour, poésie et imagination, ne pourrait pas demeurer car aucune forme stable ne pourrait accueillir les êtres et les choses.
Le monde est la rencontre équilibré , l’harmonie du din et du héssèd, « harmonie » appelée tiférèt.
Dans toute réalité finie, il faut distinguer ce qui relève de la nécessité (din) et ce qui relève de la volonté (héssèd). Et comme toute réalité, sauf celle de Dieu, est finie, tout ce qui existe en ce monde a donc un fondement de nécessité (din) et un fondement de liberté (héssèd).
Tiférèt est l’équilibre entre le clos et l’ouvert. Il unit le souffle vital et la structure limitée des êtres et des choses. Cette articulation du souffle vital infini dans les formes particularisées, c’est le rythme. Non plus simplement la vie, mais la pulsation, le rythme de la vie.


Suivre la vie du site RSS 2.0 | Plan du site | Espace privé | SPIP | squelette